Peut-on encore espérer atteindre la souveraineté numérique en France et en Europe ?
Permettez-moi d’en douter…. Et j’ai, je dois l’avouer, baisser les bras pendant quelques temps. Mais en avais-je vraiment le droit vis-à-vis des générations futures ? Doit-on abandonner l’idée ? Ne doit-on pas essayer de limiter les dégâts tout en laissant un héritage technologique performant à nos enfants ?
Alors, pourquoi ne pas tenter de développer l’usage responsable du numérique en France et en Europe ?
Cela passe obligatoirement par un grand changement des usages en limitant l’emprise des GAFA qui en vampirisant nos données pour nous inonder de publicités nous poussent à acheter sur les plateformes type Amazon au détriment des commerces de proximités qui peu à peu disparaissent des villages et des centres villes. Mais aussi, les Démocraties sont mises à mal par le seul fait d’amplifier l’impact de minorités qui savent utiliser les outils des Mass-Médias. Le numérique des GAFA nuit au lien social dans la vraie vie, ce numérique force l’humain à s’adapter au numérique alors que c’est le numérique qui devrait être au service de l’humain. Et depuis les confinements, tout ceci a pris une ampleur que nous ne pouvons plus maîtriser.
Penser Usages Responsables d’Internet permettrait à tous les acteurs de participer à un changement nécessaire des pratiques.
Stoppons la colonisation des citoyens par les GAFA, et l’utilisation sans limite des données personnelles et de navigation, qui en leurs offrant des soi-disant services gratuits les ont rendus dépendants et faisons découvrir aux citoyens nos solutions afin qu’ils deviennent Maîtres de leurs pratiques et usages numériques.
C’est un objectif prioritaire : Mon expérience sur le terrain me permet d’affirmer qu’il y a une méconnaissance des citoyens de l'utilisation d'Internet et les pratiques des GAFA et BATX. Les comportements parfois addictifs et non réfléchis, la course au "tout numérique", touchent toutes les couches sociales de tous âges. Les problèmes qui en découlent (méconnaissance des dangers d'internet, utilisations et ventes des données personnelles, commerciales et industrielles, désinformations, impact sur la santé mentale des jeunes et moins jeunes) sont identifiées.
Il apparaît pourtant que les utilisateurs, s’exposent continuellement à ces problématiques sans en évaluer les dangers.
De plus l’arrivée fulgurante de l’IA a creusé encore davantage le fossé entre les sachants et les non-initiés.
Mon expérience en établissements scolaires et l’utilisation de l’IA par les élèves m’ont permis de constater que loin de les pousser à la réflexion et l’envie de s’emparer de cette nouvelle technologie, l’IA accélère la non réflexion et le manque de créativité car elle permet à l’élève non accompagné dans son utilisation à moins en faire et moins réfléchir.
Chaque individu doit reconquérir son droit à être maître de ses choix, de sa pensée et réflexion, et de sa consommation numérique. L’autonomie passe par la connaissance, une ouverture d'esprit s’appuyant sur la remise en question des croyances « je n’aurai aucune visibilité si je ne suis pas sur Facebook, Instagram ou TikTok » et savoirs généraux « vous devez impérativement avoir Google analytique sur votre site Internet pour être référencé chez Google, ou une page sur Google » et en se libérant des algorithmes des GAFA qui vous proposent des contenus en lien avec vos navigations sur Internet, influençant ainsi vos choix.
Cette reprise de contrôle passe nécessairement par :
- Avoir libre accès aux recherches sur Internet sans traçage et profilage. (mais nous n’avons pas de moteur de recherche digne de ce nom)
- S'approprier des outils numériques permettant de se protéger et de lutter contre tous dangers liés à l’utilisation d’Internet. (Par exemple outils français Alternatifs aux GAFA et BATX pour se protéger et faire valoir son droit à la vie privé, à la propriété industrielle et commerciale....).
- Comprendre sa responsabilité « connectée » (droit et devoir vis-à-vis de ou des sociétés propriétaires des plateformes que vous utilisez, car elles sont responsables, l’impact de vos achats en ligne sur l’économie locale…).
- Former les utilisateurs pour que le numérique soit inclusif car la fracture numérique ne se limite pas, comme nous l'entendons trop souvent, au Haut Débit mais aussi à la méconnaissance des citoyens dans les territoires (les sites ou applications intuitifs ne facilitant pas l’apprentissage).
- Modifier les usages de connexion pour passer d'une consommation addictive à une consommation constructive.
- S’éduquer aux contenus pour développer sa réflexion et son ouverture d'esprit et ne pas tomber dans les pièges de la désinformation et autres dangers.
La réalisation de ces objectifs nécessite un réapprentissage et une autre façon de penser numérique :
- de l'utilisation individuelle à l'utilisation globale (chaque individu participe en modifiant ses usages d’Internet au changement global)
- Du consumérisme numérique à la pratique vertueuse
- De la non responsabilisation face à sa pratique d’Internet (ce n'est pas de ma faute, les GAFA nous sont imposés) vers un individu qui est partie prenante et agissante au travers de son utilisation du net. Cela revient à comprendre les mécanismes de colonisation des GAFA pour ne plus appréhender cette dernière comme une fatalité qui « arrive », et développer notre capacité à agir.
Les Géants du numériques ont éloigné l’humain de la transition numérique. Il est nécessaire qu'Internet s'adapte à l'humain et non l'humain au numérique.
Réaliser cette mutation rapidement implique :
- La réappropriation de l'espace numérique par l'utilisation d'outils européens non toxiques pour contrer la vampirisation américaine ou chinoise.
- Repenser la prévention car le « one-shot » ne sert à rien. Devant le flot incessant d’informations intervenir une seule fois ne sert plus à rien. (que ce soit en présentiel ou au travers de clip de prévention aussi vite oublié après avoir été visionné)
- Généraliser et vulgariser la formation à la cybersécurité car comment expliquer, qu’aujourd’hui, encore autant de personnes tombent dans le piège d’un mail ou sms grotesque.
- l'acquisition de connaissances tant basiques que complexes de l'utilisation numérique par les citoyens.
- le changement des habitudes de connexion: Intégrer dans un premier temps l'utilisation de nouveaux services indépendants des GAFA ou BATX
- Donner la possibilité aux utilisateurs de formuler leurs besoins afin que les décideurs et informaticiens adaptent le numérique à leurs demandes.
- Enclencher le partage de compétences de tous les acteurs impliqués dans la transition numérique pour que le numérique ne soit plus imposé à une majorité, mais bien pensé et développé pour répondre à des besoins.
Il convient donc de créer et développer l’usage responsable du numérique en France et en Europe car le numérique ne concerne pas que l'utilisation consommatrice d'internet. Il faut qu'il soit également pensé et au service des domaines de la santé, de l'économie, de l'écologie, de l'éducation
Cette nouvelle façon d'appréhender le numérique englobe des décideurs et techniciens du web mais également des professionnels de tous secteurs et utilisateurs pour engager les transformations nécessaires pour arriver à une utilisation vertueuse du net en mettant le numérique au service de l'humain.
Sortons de notre « tour d’argent de sachants » et créons une réflexion commune autour de l’usage responsable d’internet.
Je veux croire que tout est en encore possible…..
Gaelle Laborie